Texte de Frédéric  Alix : Docteur en histoire de l'art contemporain,

                                           Spécialiste et théoricien des avant-gardes du XXe siècle.

byandB


TRANS // FAIRE


EXPOSITION GALERIE LAVOISIER


DU 6 AU 20 OCTOBRE 2017



Si l'on ne se contente pas de considérer les formes esthétiques et la pensée créatrice comme des objets isolés, retranchés des activités humaines dans leur diversité, on peut, avec byandB, se poser ces deux questions : quel art est-il possible, quel art est-il souhaitable aujourd’hui ?


byandB produit une œuvre ne se limitant à une question de formes. Il s’intéresse à ce qui produit l’art, à ce qui l’environne, aux conditions d’émergence des œuvres en fonction de leur contexte élargi. Il essaie de comprendre ce que peut être l’art aujourd’hui, son rôle, dans le monde réel et non dans une sphère relevant d’une préciosité sacrée, retranchée des réalités actuelles et de celles qui s’annoncent. Il est ainsi attentif à l’interaction entre l’œuvre et son/ses environnement(s), à l’interaction entre ces environnements et à leurs effets sur la création. En somme, byandB souhaite poser les bases d’une réflexion véritablement pluridisciplinaire sur l’art.  


Pour le dire clairement, ce qui est en jeu ici n’est pas simplement la présentation d’un « savoir-faire ». Au-delà même de l’œuvre dans son aspect directement visuel et matériel, ce qui intéresse fondamentalement l’artiste, ce sont les aspects saillants d'un contexte global, historique, politique, économique, scientifique et intellectuel, qui forment le visage d’une époque.


Mais quelle est la nature et quelles sont les caractéristiques de notre temps ? Nous sommes dans une période qui semble être "éclatée", car nous ne bénéficions d'aucune boussole, d'aucun universalisme qui permettrait de nous coaguler en tant que "culture" transcendante. Nous sommes devenus des atomes de liberté individuelle sans projet collectif, sans grandes idées et projet d'avenir. Nous ne parlons plus à l'Histoire, car nous n'avons plus d'outils pour nous projeter. Ces outils, théoriques, ont été rejetés avec l'affirmation de notre liberté individuelle, avec la mort de Dieu, avec la mort des maitres à penser et des universalismes grandiloquents qui ont par ailleurs démontré leur échec. Comment retrouver alors un sens aux choses, un sens dépassant notre statut d'individus libres condamnés à la solitude, cela sans retomber dans les grands dogmes aveugles ?  Et qu’en est-il de l’art ?


byandB s’attache à créer un nouveau langage plastique à partir d’un vocabulaire de base. Huit formes indépendantes, et dont la modularité doit permettre une multiplicité de combinaisons et de configurations. Ces assemblages, à partir des huit formes ou signes de base en guise de nouvel alphabet, constituent des phrases qui ne sont jamais fixes, mais qui peuvent être modifiées au gré des recompositions, des déplacements de ces nouveaux « signes linguistiques ». Et s’il se déploie sur une surface délimitée ou dans un espace particulier, pour les besoins de son exposition, ce langage est susceptible de s’étendre à l’infini. En effet, cette structure souple est à l’image de la vision qu’a byandB de l’avenir de notre civilisation. Dépassant le simple cadre matériel, l’expression métagraphique de l’artiste est une pensée du « réseau ». Ou bien davantage, des « réseaux », de savoirs, d’apprentissage, de travail, échappant à toute logique hiérarchique, à tout dispositif vertical. byandB essaie de nous faire entrevoir la possibilité d’une organisation sociale échappant aux rapports de pouvoirs traditionnels, aux fixités en guise de normes et de barrières isolant l’individu. Connectés, nous pouvons déjouer les frontières traditionnelles, former des réseaux souples et momentanés, pour en former d’autres ensuite. C’est un universalisme sans dogmes, qui n’indique aucun mot d’ordre.  Mais qui permet de rebattre les cartes de notre rapport au monde en tenant compte de l’esprit de notre temps, tout en nous ouvrant à l’infini renouvelé d’un espace toujours en mouvement.